L’équipe de la diagonale des fous inclusive (DDFI), un projet de Réseau Autonomie Santé (RAS), a participé à une fin de semaine inclusive lors du Québec Mega Trail (QMT) du 29 juin au 2 juillet dernier! Ce weekend a débuté par notre participation à la soirée d’ouverture qui a accueilli quelques membres de l'équipe. Ceux-ci ont pu échanger avec la délégation du Grand RAID, cet événement mythique qui a lieu à l'île de la Réunion où notre équipe participera à La Diagonale des Fous en octobre 2024.
Par la suite, l’équipe a animé un kiosque à l’entrée du site, faisant découvrir la Joëlette, un équipement adapté à la marche en montagne qui sera utilisé pour transporter Samuel Saucier à La Réunion. Soulignons l’expérience de Raymond, 93 ans, qui a pu découvrir le site du QMT confortablement assis dans la Joëlette. D'autres membres se sont retrouvés derrière le bar, servant de la bière aux visiteurs, avec tous les pourboires dédiés au projet de la DDFI. Cela a marqué un début de week-end festif, ensoleillé et chaleureux, l’équipe étant majoritairement accueillie par la famille d’Alice, un membre de notre équipe.
Le dimanche a été le théâtre d’une journée qui s'est révélée mémorable. L'équipe s’est rassemblée bien avant le départ officiel pour prendre un départ anticipé à 6h50, sous une pluie torrentielle. Ils se sont engagés dans la section du sentier « La Libériste », un sentier sinueux qui ne cessait de monter et de monter. Le portage s’est avéré difficile et glissant, et le son du départ des autres coureurs du parcours a ajouté une couche de stress à l'équipe. Mais la persévérance et la solidarité de l’équipe ont pris le dessus. L’ensemble du parcours s’est fait dans la bonne humeur, les rires. Samuel nous avait autorisés à l’échapper trois fois, mais ça ne sera arrivé qu’une seule fois, et tout en douceur.
Bruno Blanchet qui prend l'équipe de la DDFI en photo, tout juste avant le départ.
Le parcours du QMT25 (disponible à la fin de cet article), connu des amateurs du Mont Saint-Anne, a été un défi de taille. Malgré quelques embûches, l'équipe a complété la course de 25 km (28 km selon leur mesure) en 9h32. À leur arrivée, même si l'arche et la foule avaient disparu, leurs supporters les attendaient avec une bonne bière froide, et le soleil s’est enfin montré pour célébrer ce moment spécial.
Pour mieux comprendre cette expérience, nous avons recueilli les témoignages de quatre de nos participants, Éric Sévellec, Sylvie Croteau, Pierre-Luc Boily et Anne-Marie Fecteau, ainsi que d'une coureuse qui participait au QMT25 et qui les a croisés lors de sa course. Leurs récits viendront enrichir notre récit de cette aventure inoubliable.
Éric Sévellec :
Pour Éric, cette participation représente bien plus qu'une simple course de trail. C'est un rêve qui a pris forme en 2017, lorsqu'il a découvert l'événement de la Diagonale des Fous. Éric s'est rendu compte qu'il ne pourrait pas relever ce défi seul, mais grâce à l’équipe de la DDFI, il a maintenant l'opportunité de vivre cette expérience extraordinaire.
Le QMT25 a été le premier véritable test pour l'équipe sur un long parcours. Éric a pu constater une nette amélioration dans tous les aspects pour l’équipe si on compare à d'autres courses, telles que le Notos 10 km, par exemple. Il a été agréablement surpris par la solidarité qui émanait de l'équipe. Chacun a trouvé sa place, et malgré les éventuelles difficultés, l'harmonie et le soutien mutuel ont prévalu. Éric souligne l'importance d'une communication efficace entre les porteurs, notamment lors des changements de position, afin de garantir la sécurité et la fluidité du parcours.
Malgré les nombreux défis rencontrés, Éric a su leur faire face avec détermination. Il admet avoir trouvé certaines parties de la course plus difficiles, notamment le portage arrière. Néanmoins, il considère cela comme une source de motivation pour s'améliorer et contribuer davantage à l'équipe. Éric envisage d'expérimenter différentes approches, tel que l'ajustement du harnais à l'envers, afin d'optimiser ses performances et de soulager l'équipe dans les moments critiques.
Lorsqu'on lui demande de décrire sa journée en trois mots, Éric choisit « solidarité », « émotion » et « effort ». Ces termes reflètent parfaitement l'essence de son expérience. La solidarité entre les membres de l'équipe, l'émotion ressentie tout au long de la course et la réalisation de son rêve personnel contribuent à rendre ce moment inoubliable.
En haut : Éric en compagnie (de gauche à droite) d’Anne-Marie, de Stéphanie et de sa conjointe, Julie. En bas : Denis Laliberté.
Sylvie Croteau :
Dès le départ, Sylvie a été impressionnée par l'organisation ajustée au quart de tour de l'événement. L'équipe du Québec Mega Trail s'est montrée préparée, accueillante et ouverte, offrant à chaque participant un cadre propice à la réussite. Les sentiers étaient balisés de manière exemplaire, même si le GPS de Sylvie a rencontré quelques difficultés à suivre le parcours. Malgré cela, l'organisation impeccable et la convivialité des personnes impliquées, en particulier celles qui travaillaient en coulisses, ont rendu l'expérience encore plus spéciale.
Pour Sylvie, participer à une équipe inclusive dans une course de trail revêtait une signification profonde. C'était une occasion pour elle de faire du bénévolat et de redonner aux autres. L'équipe de la DDFI lui a permis d'utiliser ses compétences physiques pour offrir à d'autres la possibilité de vivre des expériences uniques.
L'une des plus belles surprises de Sylvie lors de cet événement fut de voir l'engagement et le dépassement de soi de ses coéquipiers. Pour Sylvie, c'était une occasion de découvrir de nouvelles facettes des personnes qu'elle pensait connaître et de constater la force et la détermination qui émanaient de l'équipe. Elle se réjouissait de voir chacun trouver sa place et devenir une partie essentielle de cette aventure collective.
En ce qui concerne ses objectifs pour la course, Sylvie souhaitait transformer cette expérience en un véritable entraînement. Elle voulait qu’on effectue cette course en faisant du portage, notamment. Elle voulait aussi que chaque membre de l'équipe se dépasse personnellement et que chacun développe un véritable esprit d’équipe.. Elle était fière de voir comment ces valeurs étaient devenues une réalité tout au long de l'événement, créant ainsi une belle dynamique au sein de l’équipe.
Sylvie a également joué un rôle actif dans la coordination de l'événement, travaillant en étroite collaboration avec l'équipe du QMT. Elle a été impressionnée par leur professionnalisme et leur soutien. L'équipe du QMT s'est montrée proactive dans son engagement envers l'inclusion et a ouvert des portes pour permettre à l'équipe de réaliser son projet.
Finalement, terminer la course en portant a été un moment de grande fierté pour Sylvie. Elle a réalisé qu'elle jouait un rôle clé dans le projet cette journée-là et a ressenti une confiance mutuelle avec ses coéquipiers. C'était un symbole puissant de l'esprit d'équipe et de la confiance qui se sont développés au sein du groupe. Elle était fière d'avoir contribué à la réussite de l'équipe et de voir les autres participants heureux et émus par leur expérience.
Daisy et Sylvie, deux membres de la DDFI, qui ferment et débalisent une section du parcours du 100 miles le vendredi 29 juin lors du QMT.
Pierre-Luc Boily:
Pierre-Luc était rempli d'excitation et d'anticipation pour la journée de dimanche. Bien que la météo ne fût pas idéale, l'excitation l'emportait sur toute hésitation qu'il aurait pu avoir, évoquant qu’il aurait peut-être annulé sa course s’il avait été seul. Au lieu de cela, l'événement avait pris un sens particulier pour lui, et il aurait même souhaité que cela dure plus longtemps. Il mentionne être déçu lorsqu’on l’a informé sur la distance restante lors du deuxième ravitaillement, mais qu’une fois arrivé, il aurait aimé poursuivre encore le périple. Physiquement, il est conscient des zones où la douleur pourrait se manifester, mais il est satisfait de sa performance et souligne que la communication entre les coureurs s'est bien passée. Il décrit la sensation à la fin de la course comme étant « enivré par l'accomplissement ».
« C'était comme si j’avais l'impression d'être un peu saoul avant la bière. On arrive à la fin, enivré par l'accomplissement qu'on vient de faire là… c'était vraiment quelque chose. »
Concernant ses attentes, Pierre-Luc révèle qu'il n'espérait qu'une chose: passer au travers. Cependant, il a été surpris de voir à quel point les choses se sont bien passées malgré la diversité du groupe. Il note que certains duos fonctionnent mieux que d'autres et mentionne avoir adoré porter avec Janick, par exemple. Il exprime son admiration pour Stéphane qui a lui aussi porté la Joëlette, malgré son amputation. La capacité de Stéphane à participer l'a particulièrement estomaqué. La volonté et la force de son équipe l'ont impressionné.
« Je le suis, je le vois qu’il porte la Joëlette, et qu’il est solide en plus. Je me suis dit “wouah“, on n’a pas n’importe qui dans notre équipe! C’est du monde qui ont une volonté de fer. C’est impressionnant. »
Deux moments ont particulièrement marqué Pierre-Luc. Le premier est la chute de Sam, alors qu’il portait la Joëlette avec Éric. Cet incident l'a amené à réaliser brutalement pourquoi ils faisaient ce défi. Il décrit la situation comme plus une glissade qu'une chute, mais l'incident l'a néanmoins saisi. Le second moment était l'impact de leur défi sur les autres coureurs. Certains étaient initialement mécontents d'attendre, mais leur frustration s'est transformée en émerveillement une fois qu'ils ont compris l'ampleur du défi.
Pierre-Luc explique que cette expérience n'a rien à voir avec sa routine habituelle de course. Il aime être avec les gens et pouvoir discuter. Courir seul pendant 9h30, ça ne l'intéresse pas. Cette journée lui a apporté beaucoup de plaisir et de satisfaction, car il sentait qu'il servait à quelque chose, tant physiquement qu'humainement. Contrairement à la course en solo, qui ne sert qu'à le maintenir en forme (et permettre de manger de la poutine, comme il nous raconte), cette expérience apporte quelque chose de plus. Il aspire à voir plus de gens dans sa région s'engager dans ce genre d'activité, notamment lors du Défi Vertical le 23 septembre prochain.
Pour encapsuler la journée, Pierre-Luc choisit les mots Bouette, Fierté et Apprentissage. « Bouette » symbolise l'aspect exigeant et salissant de la course. « Fierté » reflète l'accomplissement ressenti dans cette aventure unique. « Apprentissage » montre que l'expérience a été instructive, lui permettant de comprendre son corps et la dynamique de l'équipe.
Pierre-Luc qui se prend en « selfie » au premier ravito lors de l’ascension de l’équipe!
Anne-Marie Fecteau:
La course du dimanche a été une expérience mémorable pour Anne-Marie, marquée par une appréhension palpable et une grande satisfaction. C'était sa première fois sur un trail de 25 km, un défi bien au-delà de tout ce qu'elle avait déjà expérimenté. Les conditions difficiles, notamment les dénivelés et les terrains boueux, ajoutaient une couche supplémentaire de complexité.
Mais au-delà de l'aspect physique, cette course a été une riche expérience humaine pour Anne-Marie. Elle a souligné l'importance du travail d'équipe, de la communication et du soutien mutuel. Passer près de 10 heures avec un groupe de personnes a créé des liens indélébiles, renforcés par un esprit positif constant.
Anne-Marie voyait également la course comme un test, un moyen de se préparer à d'autres défis, comme l'île de la Réunion. Avec 16 personnalités différentes, l'expérience a été un excellent moyen de voir comment chacun réagirait et travaillerait ensemble, sans accrochage.
Comparant cet événement avec une marche de 50 km autour du réservoir Beaudet lors du 24h de course organisée par RAS en collaboration avec Handicap Action Autonomie Bois-Francs, Anne-Marie les a décrits comme deux expériences complémentaires. La marche de 50 km a été une épreuve de force mentale, où son esprit a réussi à la mener à la fin malgré la douleur physique. Cela lui a donné confiance pour le 25 km, prouvant que son corps et son esprit étaient capables de réaliser l'effort.
« Il faut dire que j'étais rendu dans mes derniers retranchements [lors de la marche de 50km]. Je comptais dans ma tête, c'était la seule affaire qui me faisait avancer. Je me suis rendu à 490, parce que c'est la seule affaire qui fonctionnait. J'avais tellement mal. J'étais comme rendu sur le mode “pilote automatique”. Mais ça m'a permis de voir à quel point le mental peut être fort. »
Au sujet de sa performance, Anne-Marie a exprimé une grande fierté et satisfaction. Malgré les conditions difficiles, elle a trouvé la force et la détermination de parcourir 28 km, bien plus que les 25 km prévus. L'effort a été palpable, mais la positivité et les sourires à la fin de la course montrent la réussite de cette expérience.
La difficulté de la course pour Anne-Marie résidait principalement dans les conditions. Le portage ajoutait un poids conséquent, rendant l'effort encore plus considérable. Les conditions météorologiques, les terrains boueux, et le défi physique en général ont rendu la course plus éprouvante, mais pas insurmontable.
La plus belle surprise pour Anne-Marie a été la cohésion et l'entente de l'équipe. Elle a été touchée par la compréhension et la connexion entre les membres, et a été particulièrement heureuse de se sentir à sa place dans l'équipe malgré ses doutes initiaux.
Persévérance, dépassement de soi, et solidarité sont les mots choisis par Anne-Marie pour décrire cette journée inoubliable.
En résumé, Anne-Marie exprime son contentement et son amour pour l'équipe. Elle, qui était une amatrice de confort et qui ne s'entraînait pas 7 mois avant l’événement, trouve maintenant toutes les raisons du monde à continuer. Elle est touchée et étonnée d'avoir été approchée pour participer et se sent reconnaissante de cette opportunité qui lui a permis de se découvrir. La course a été pour elle un véritable « coup de foudre » pour l'équipe, et une preuve que l'effort et la détermination peuvent conduire à de grandes réussites.
Anne-Marie tout juste avant le départ alors que l’équipe était rassemblée sous le chapiteau pour des instructions de dernière minute.
Vanessa Garant, une participante du QMT25
Lors du QMT25, RAS a eu l'occasion de partager un moment spécial avec Vanessa Garant, une coureuse que l'équipe a croisée en chemin. Amie de Pierre-Luc, Vanessa nous a confié que cette rencontre inattendue l'avait inspirée tout au long de sa course.
Alors qu'elle était en pleine course, plongée dans ses pensées et ses efforts, Vanessa a été surprise et émue par une scène hors du commun. Elle a croisé la route du convoi de la DDFI, composé d'une quinzaine de personnes, travaillant en harmonie pour transporter une personne en Joëlette à travers un singletrack technique, boueux, et en montée.
Cette rencontre impromptue a eu un impact profond sur Vanessa nous partage-t-elle. Les larmes aux yeux, le sourire aux lèvres, et le cœur gonflé d'admiration, elle a dépassé le convoi, les encourageant de toutes ses forces. Alors qu'elle continuait son chemin en solo, elle se sentait accompagnée par la force et la bonté de cette équipe. Elle n'était jamais seule.
La solidarité et l'humanité démontrées par la DDFI ce jour-là ont permis à Vanessa de voir la beauté en l'être humain, comme elle nous l’a exprimé. Pour elle, cette rencontre a été une expérience puissante et émouvante, un rappel vibrant de ce que nous pouvons accomplir ensemble, et une inspiration qui l'a portée jusqu'à la ligne d'arrivée.
Ensemble jusqu'à la fin
Le week-end du Quebec Mega Trail sera gravé dans nos mémoires comme un moment de solidarité, de défi et d'humanité. La Diagonale des Fous Inclusive ne se limite pas à un défi sportif; c'est un appel à un monde plus inclusif et égalitaire. Du coureur novice telle Anne-Marie, qui a découvert une passion et une force intérieure, à Stéphane, qui a défié les obstacles avec une amputation, en passant par la rencontre inspirante avec Vanessa en chemin, chaque histoire est un témoignage de ce qui est possible lorsque les gens se réunissent dans un but commun. Les mots de Pierre-Luc - « bouette, fierté, apprentissage » - résument bien l'essence de cette expérience unique, marquée par l'exigence physique, l'accomplissement et la croissance personnelle et collective. La route vers l'Île de la Réunion en octobre 2024 est encore longue, mais chaque étape nous rapproche de notre objectif. Merci à tous ceux qui nous soutiennent et croient en ce magnifique projet. Nous vous attendons en grand nombre lors de nos prochains défis.
Le parcours du QMT25 était le suivant : départ dans la Libériste et ensuite le sentier des bouleaux, la coulée, l’enduro nord, la dryade, la montée Saint-Hilaire, les faux plats, l’enduro sud, la liberté 55 pour finir dans le sentier du moulin. Un parcours technique, surtout en Joëlette. (Crédit photo : Mont Saint-Anne)